L’inconscient : qu’est-ce que c’est ?
Comment définir l’inconscient ? L’« inconscient » serait le contraire, voir l’opposition de « conscient ». On aurait donc d’un côté quelque chose que l’on a conscience de faire, c’est-à-dire « je sais que je le fais », et de l’autre, quelque chose dont on n’aurait pas conscience, c’est-à-dire « je le fais sans m’en rendre compte ». L’inconscient serait donc cette force qui nous ferait faire des choses sans qu’on le sache, des choses qui nous échappent. Cela provoquerait des phénomènes inaccessibles à la conscience mais qui ont un réel impact sur elle.
La notion d’inconscient a beaucoup évolué depuis son invention. De nombreux philosophes ont contribué à ce changement. Même si l’on attribue ce concept à Freud, il n’est pas le premier à l’avoir mis à jour.
Le concept d’inconscient s’est véritablement établit grâce à la psychanalyse. Et c’est Freud qui va systématiser cette notion, l’expliquer.
L’inconscient est au cœur de la pratique hypnotique car c’est à lui que l’on s’adresse pour trouver les forces reconstructives qui sont en chacun de nous. Il renferme toutes les clés, toutes les solutions dont nous avons besoin pour nous rétablir.
Alors, qu’est-ce que l’inconscient ? Comment peut-on le définir ? Comment cette notion a-t-elle évoluée ?
Les précurseurs : Qui sont ceux qui ont mis en évidence la notion d’inconscient ?
Je ne ferai pas ici une liste exhaustive de tous les philosophes qui ont participé à l’élaboration de cette notion, mais ceux dont la vision a marqué la mise en place du concept. Freud n’est pas le premier à avoir mis à jour la notion d’inconscient : Schelling, Hegel et Schopenhauer lancent en premier ce concept philosophique. Il y aurait une force irrationnelle et active qui ferait que l’homme pourrait ignorer les motifs véritables de certaines de ses actions.
D’autres, comme Carl Gustav Carcus, expliquent que l’inconscient est un principe divin qui préside à la fois à l’organisation du monde, à notre vie organique et à notre vie spirituelle. Il y aurait deux types d’inconscient : l’absolu et le relatif. Le contenu de l’inconscient absolu serait inaccessible à la conscience, le relatif, quant à lui, serait le fruit de la dégradation de certaines opérations conscientes. Le rêve serait l’intrusion de l’inconscient dans le conscient. Pour Carcus « la connaissance de la vie psychique consciente à sa clé dans la région de l’inconscient. »
Pour E. Von Hartmann, l’inconscient représente l’âme universelle : l’UN TOUT qui apporte à la nature une logique immanente. Il fait également la distinction entre l’inconscient dans la vie corporelle et l’inconscient dans l’esprit humain.
La philosophie de l’inconscient a donc été féconde avant Freud. Elle met en valeur l’idée d’une force inconsciente qui gouverne l’activité consciente, l’inconscient soutient normalement le conscient. Mais c’est réellement les recherches médicales, notamment celles sur l’hystérie avec Freud, qui va donner son essor à ce concept.
Freud révolutionne la notion d’inconscient.
Le travail de Freud sur l’inconscient est tellement considérable qu’il est difficile ici de tout expliquer, je vais donc résumer les points importants de ses découvertes.
C’est grâce à sa rencontre avec Charcot, Breuer et Bernheim que Freud va se lancer dans l’étude approfondie de l’inconscient afin de théoriser et expliquer le fonctionnement de ce concept. Dans ses études sur l’hystérie, il relie les troubles au vécu des patientes. Les origines des troubles se trouvent dans le passé et, est souvent refoulé. L’inconscient envoie donc des messages qu’il est difficile de décoder (rêves, lapsus, symptômes…). L’une des explications phare de Freud est que l’inconscient est une sorte de réservoir de choses refoulées, c’est-à-dire, qui est inacceptable pour le conscient, qui décide alors de « l’oublier ». Mais cette chose ne s’oublie pas, et va dans un endroit où elle continue de vivre sans que nous le sachions. Charcot attribuait l’hystérie à l’auto-suggestion, Freud, lui, l’attribue à l’inconscient.
L’inconscient prend le dessus quand le Moi[1] est défaillant. Les éléments refoulés veulent alors refaire surface mais comme l’inconscient ne parle pas le même langage que le conscient, alors il se manifeste de façon que l’on ne comprend pas toujours.
Freud comprend très vite que pour guérir les patientes, il faut retrouver le souvenir qui a été refoulé, mais l’inconscient ne facilite pas cet accès. Il va alors utiliser la méthode dite de « libre association » pour y parvenir. C’est grâce à l’hypnose que Freud va permettre aux patientes, par l’association d’idées, de remonter au souvenir qui cause le trouble.[2]
Le rêve est également pour Freud une manifestation importante de notre inconscient. Pour lui « le rêve représente la réalisation déguisée d’un désir refoulé, ou encore, plus brièvement, le rêve est un accomplissement du désir » Il est la manifestation de l’intrusion de l’inconscient dans le conscient.
Les actes manqués sont également pour Freud une preuve de la manifestation de l’inconscient.
Enfin, la théorie de Freud sur l’inconscient repose essentiellement sur le fait que tous les éléments refoulés sont de nature sexuelle (complexe d’Œdipe, de castration…) Il faudrait donc chercher dans les manifestations de l’inconscient des souvenirs de l’enfance, tous reliés aux pulsions sexuelles…
Freud est donc celui qui a le plus expliquer le fonctionnement de l’inconscient et mis en place les méthodes pour pouvoir y accéder.
Après Freud : l’évolution de la notion d’inconscient.
D’autres philosophes, médecins, se sont inspirés des théories de Freud sur l’inconscient. Mais peu à peu, ils s’éloignent du concept original.
Adler par exemple, ajoute le principe d’activité compensatrice de l’inconscient. En effet, quand on nait avec une défaillance quelconque, alors l’inconscient n’aura de cesse de compenser cette défaillance avec ce qu’Adler va appeler « la volonté de puissance » qui va étouffer le sentiment d’infériorité. Pour Adler, Freud n’étudie pas assez les instincts.
Jung est sans nul doute le disciple de Freud qui va le plus se distinguer avec sa notion d’inconscient collectif. Il y aurait en chacun de nous des caractéristiques universelles qui se retrouvent dans toutes les civilisations (une série d’expériences millénaires qui se matérialise dans les mythes). Ce passé collectif est stocké en chacun de nous et ressurgit sous forme d’instinct. Jung appelle cela les archétypes. Nos réactions sont donc conditionnées par ces archétypes. Il en dénombre plusieurs mais voyons ici les plus importants. Personna : c’est le masque que l’on porte en fonction de notre statut social, notre métier. C’est la recherche du paraitre, l’adaptation au milieu. Le risque ici est d’oublier sa propre personnalité. L’ombre : ce que nous refoulons, ce que nous refusons d’être. Cela regroupe toutes les mauvaises pulsions. Nous pouvons faire ici un parallèle avec le refoulé de Freud. L’ombre projeté : on rejette nos vices, nos défauts sur une autre personne. Par exemple, si nous rejetons quelqu’un d’arrogant, il y a de fortes chances que nous le soyons nous même !
Jung ajoute la notion d’Adler à celle de Freud et insiste sur le fait que Freud à tort de restreindre l’inconscient à du sexuel refoulé. Même si Freud parle d’un inconscient collectif, il n’est pas le même que celui de Jung[3].
Parlons de Lacan pour finir. Ce dernier fait un retour sur la notion freudienne de l’inconscient et sa dimension symbolique, mais il va plus loin. Pour lui, l’inconscient est structuré par un langage, il montre que « c’est dans le champ privilégié de la parole qu’il faut restituer la découverte Freudienne de l’inconscient comme un système radicalement autre par rapport au système préconscient conscient ». Lacan met en place un véritable système rhétorique de l’inconscient : c’est un langage structuré « ça parle dans l’homme ».
Que faut il retenir de cette notion d’inconscient ?
La notion d’inconscient à bien évolué. Aujourd’hui, même si Freud reste le pionnier dans la compréhension et le fonctionnement de ce dernier, nous avons pris de la distance avec certaines de ses théories. Nous avons surtout compris que l’hypnose est le moyen privilégié pour entrer en contact avec notre inconscient. Elle permet de renouer le dialogue entre ces deux parties de nous : le conscient et l’inconscient, qui peut provoquer des changements salvateurs dans notre vie quotidienne. Milton Erickson l’a bien compris et a mis en place une méthode pour dialoguer avec l’inconscient. C’est cette méthode qui fera de lui le père des thérapies brèves.
[1] Freud invente les notions de Ca, Moi et Surmoi. Le Ca est l’ensemble des instincts primitifs qui comporte tous les éléments refoulés d’ordre sexuel et organique. Le Moi est le système de conscience et de perception, il contrôle les mouvements, c’est le centre de départ des réactions de défense. Le Surmoi est une morale archaïque infantile hérité du complexe d’Œdipe, pour Freud, c’est l’inconscient.
[2] L’idée A entraine l’idée B qui va ensuite entrainer l’idée C et ainsi de suite jusqu’au souvenir que l’on souhaite atteindre.
[3] Pour Freud, il y a en chacun de nous des éléments qui se trouvent dans tous les inconscients mais qui s’expliquent par le complexe d’Œdipe ou autres théories. Pour Jung, les archétypes sont hérités d’un savoir ancestral, préexistant à notre naissance.